Bonjour Olivier Meier, alors comme cela on travaille sur la compréhension de la société ?
Oui Olivier, bien que professeur en sciences de gestion et du management, j’en ai ressenti le besoin. La société actuelle me semble à bien des égards complexe, instable et parfois déroutante…Essayer de mieux la comprendre m’aide à mieux penser et agir avec discernement et responsabilité.
Je comprends bien, mais pourquoi « par les sciences sociales »
C’est une très bonne question. Car si les solutions sont certainement à rechercher dans le domaine des sciences économiques et de gestion, les sciences sociales nous offrent des grilles de lecture particulièrement utiles pour appréhender les phénomènes sociaux et sociétaux… Depuis deux ans, mieux vaut être armé pour apprendre à gérer une crise sanitaire qui a paralysé l’activité économique et sociale pendant des mois, comprendre et agir face aux risques de violence sociale et urbaine, continuer à vivre dans un monde complexe et incertain…. Par conséquent aborder la société par une meilleure compréhension de la crise des élites au pouvoir (Charles Mills Wright), du rôle des minorités actives (Serge Moscovici), des risques de désaffiliation sociale (Robert Castel), de délitement des liens sociaux (Serge Paugam) et de déviance (Howard Becker), de la figure du bouc émissaire (Rémi Casanova) de l’importance de l’identité sociale (Henri Tajfel) ou d’identité au travail (Renaud Sainsaulieu) avec les conséquences que cela peut générer chez tout décideur en termes de biais cognitifs (Daniel Kahneman) et de dissonance (Léon Festinger)…
Mon cher Olivier, tout ceci n’est pas très optimiste
J’en conviens. Mais cela ne veut pas dire qu’il n’y ait pas des moyens d’espérer… Rien ne nous empêche de construire des solidarités organiques (Emilie Durkheim), de travailler en bonne intelligence sur nos besoins fondamentaux (Abraham Maslow), en repensant différemment les sources de légitimité (Max Weber), les systèmes de justification (Luc Boltanski), les dimensions du leadership (Laurent Lapierre) ou les apports en capital (Pierre Bourdieu). Ce n’est pas parce qu’on perçoit les illusions du management (Jean-Pierre Legoff) et l’hypocrisie organisationnelle (Nils Brunsson) que de nouvelles images de l’organisation (Gareth Morgan) ne sont pas possibles. Je crois à notre capacité de résilience (Karl E. Weick), à la sérendipité (Danièle Bourcier) et à notre possibilité de concilier exploitation et exploration (James G. March) pour mieux gérer les controverses et produire de l’innovation partagée (Michel Callon).
Ne serais-tu pas en train de mettre en avant les différents concepts présentés dans le livre ? Et les auteurs qui y sont associés ?
C’est une très bonne remarque. J’ai essayé à travers ce livre, de proposer une grille de lecture originale, en partant d’une notion clé, plutôt que de traiter d’une théorie générale. J’ai donc souhaité proposer une lecture ludique et sélective qui passe par une sélection de concepts fondamentaux ou originaux, qui sont de nature à éclairer les débats d’actualité sur la société : les inégalités sociales, la diversité, la pauvreté… C’est aussi une façon de redécouvrir des auteurs unanimement reconnus (E. Durkheim, M. Weber, R. Sainsaulieu, J. Schumpeter…) mais aussi de faire connaître des auteurs parfois qui le sont moins (G. Bajoit, R. Casanova, L. Lapierre, M. Ringelman…), mais dont les réflexions et les analyses forcent l’admiration.
Tu ne les as pas tous cités ?
Non, il y a au total, 40 concepts clés avec auteurs et argumentations. Je laisse maintenant le lecteur en prendre connaissance, afin de trouver des éléments de réponse aux enjeux et débats qui animent actuellement la société.