L’environnement volatile, incertain, complexe et ambigu (VICA) a propulsé l’employabilité au centre des préoccupations. L’entreprise se transforme en permanence, et doit répondre au plus vite à ses besoins en nouvelles compétences. Le collaborateur, lui, doit ajuster ses compétences aux évolutions du marché, de la technologie, de l’organisation, des méthodes de travail, etc.
Les deux réformes de la formation professionnelle (2014 et 2018) placent d’ailleurs le collaborateur au cœur de son parcours de développement professionnel d’une part et lui donnent accès à de nouvelles modalités pédagogiques d’autre part. L’article 4 de la Loi du 5 septembre 2018 est, à lui seul, un trésor de perspectives de progrès dans la conception pédagogique de formations professionnelles pour un plus grand service rendu au collaborateur et une meilleure rentabilité pour l’entreprise.
" L’action de formation mentionnée au 1° de l’article L. 6313-2 se définit comme un parcours pédagogique permettant d’atteindre un objectif professionnel. Elle peut être réalisée en tout ou partie à distance. Elle peut également être réalisée en situation de travail. "
Même si l’application des décrets " à distance " et " en situation de travail " reste compliquée pour certains, cette définition est puissante et résolument pragmatique. La fixation d’un objectif de compétence à acquérir ou développer et la notion de parcours nécessitent plus que jamais de s’appuyer sur la méthode des projets, d’ancrer les apprentissages dans la réalité professionnelle du collaborateur, d’accompagner l’apprenant dans son " parcours " et d’aborder l’évaluation comme un GPS plutôt que comme une note ou une sanction.
Au-delà du fait que cela bouscule les formats classiques en salle et parfois descendants, c’est une formidable opportunité d’innover en s’appuyant judicieusement entre présentiel et à distance, humain et digital, individuel et collectif, réflexions et actions.
Ouvrant une voie réelle et réaliste à la pédagogie adaptative, cette définition impose également une prise en compte réelle des enjeux particuliers de l’entreprise de l’apprenant. Cette approche systémique vient impacter les formations sur étagère sans lien entre les besoins de l’entreprise et les aspirations du collaborateur. C’est ce pont qu’il faut permettre dans les formations de demain pour réussir les changements organisationnels et culturels de l’entreprise.
Ces changements de fond dans la définition même de la formation et le recentrage sur le projet professionnel du collaborateur ouvrent la voie à une démarche plus intime de l’accompagnement au changement et au développement des compétences en entreprise. Une opportunité à saisir pour les personnes en charge de la gestion des talents ou de la formation, de plus en plus fréquemment en charge également de piloter de gros projets de transformation.
Des initiatives particulièrement innovantes, utilisant pleinement les technologies digitales, ont ainsi été mises en œuvre au sein de grandes entreprises comme, par exemple, Allianz, Bouygues, Novartis, Air France ou encore Schlumberger.
En s’appuyant notamment sur la solution iNNERSHiP, start-up franco-canadienne, des leaders au sein de ces entreprises ont réussi à ancrer des changements en profondeur grâce à la responsabilisation (empowerment) de chaque collaborateur.
Concrètement, des programmes de développement alliant coaching digital, humain et ateliers collectifs, ont permis à chaque individu de faire le lien entre les besoins de l’entreprise en transformation et ses aspirations individuelles, ses talents et ses forces. Chacun a pu ainsi prendre l’initiative, y trouver du sens et devenir le 1er acteur de son propre développement.
Ces expériences innovantes, où l’individu est replacé au centre, menées dans des environnements de travail variés, ont apporté de précieux enseignements. Alors pour accompagner efficacement vos collaborateurs dans le changement, et utiliser pleinement toute la puissance du digital, voici quelques règles de bon sens et de conditions à respecter :
1 Faire du digital une expérience humaine
Les réformes de la formation laissent une place de choix au digital pour structurer, faciliter l’ancrage individuel, apporter de la science, du plaisir, des échanges sans contrainte spatio-temporelle et de l’intelligence.
C’est une réelle avancée et le recours au digital apporte évidemment des avantages incomparables.
Néanmoins, certaines entreprises suivent une mode de digitalisation à outrance lorsqu’il s’agit de formation, en offrant des solutions 100% digitales, des universités en ligne, du eLearning à volonté ou en lançant la dernière app qui fait le buzz.
Or les statistiques d’utilisation montrent que le tout-digital fonctionne mal. L’expérience d’accompagnement de chaque individu, dès lors que l’on parle de développement de soi et de changement, doit avant tout être humaine et même chaleureuse, afin de permettre d’établir une relation de confiance entre le participant et les personnes qui l’accompagnent. Digital et humain peuvent et doivent être complémentaires dans l’expérience vécue.
2 Personnaliser l’expérience
L’époque des formations standards est révolue. C’est la fin du "one size fits all”. L’articulation du parcours de formation devient une expérience personnelle. Le digital permet désormais un très grand niveau de personnalisation de l’expérience. Chacun peut s’approprier à sa manière, a son rythme, les changements en cours dans l’entreprise - changement organisationnel, culturel, de poste, de posture, de comportements … Chacun peut être accompagné selon ses besoins, et faire ce lien entre ses aspirations authentiques et les enjeux de l’entreprise pour y trouver du sens.
Développer les talents selon des valeurs ou un modèle de compétences défini ne veut pas dire développer des clones. Chacun part d’un point A différent, et avec le bon accompagnement grandira vers un point B, le sien, tout en le rapprochant des enjeux de l’entreprise.
Une telle personnalisation, rendue possible par le digital, n’empêche pas de combiner individuel et collectif, et va pouvoir varier en fonction du moment de carrière de chacun : prise de poste, développement, mobilité.
3 Mesurer avec précision
Grace au digital, il n’a jamais été aussi facile de mesurer le succès quand on parle de formation et d’accompagnement au changement. Assurez-vous de le faire rigoureusement : dès le départ avec la fixation d’objectifs, tout au long du parcours de développement avec des indicateurs de suivi, et enfin bien-sûr à l’issue du parcours avec une mesure de l’impact désiré.
Il est d’ailleurs désormais possible d’intégrer certaines mesures, comme la satisfaction du participant ou le niveau d’appropriation sur une thématique donnée, tout au long de parcours de développement.
L’utilisation du digital, de manière appropriée et positionnée au service de l’humain, peut ici vous permettre de combiner précision, simplicité et confidentialité des réponses.
Changements permanents, opportunité du digital, employabilité et évolution du cadre législatif en France : leaders et RH doivent saisir ce momentum pour renouveler en profondeur le développement des collaborateurs au service de la transformation. Ces évolutions apportent déjà de précieux bénéfices, tant aux entreprises en mutation qu’aux individus qui souhaitent se développer. Dirigeants, managers et RH ont l’opportunité de réussir leurs changements grâce à des collaborateurs responsabilisés et acteurs de leur propre développement.
Thomas d’Hauteville & Anna Suchodolski
Thomas D’Hauteville est l’un des cofondateurs et codirigeant de la société iNNERSHiP
Anna Suchodolski est Business Partnet et Coach au sein de la même société